Avis d’expert – Janvier 2015
Dans une étude intitulée The Future of Privacy, rendue publique le 18 décembre 2014, l’institut Pew Resarch Internet Project a compilé les prédictions de plus de 2500 experts, universitaires ou acteurs de l’économie numérique à propos de la protection de la vie privée sur internet à l’horizon 2025. Le résultat est à la fois instructif et décoiffant.
La protection de la vie privée dans l’univers du numérique ? A la lecture de l’étude The Future of Privacy publiée par l’Institut Pew Resarch Internet Project, force est de constater qu’un fossé sépare ceux qui y croient encore et ceux qui n’y croient déjà plus.
Pour biens des observateurs, la privacy va connaître une forte érosion au cours des 10 prochaines années sous l’effet conjugué du développement de l’Internet des Objets, du Big Data et des algorithmes prédictifs. Tous les objets du quotidien vont devenir des espions. Ces mutations technologiques s’accompagneront d’une évolution des mentalités. La publication en ligne de nos existences deviendra la norme par défaut et même une obligation pour pouvoir exister. Les nouvelles générations n’auront plus à souffrir dans leur vie professionnelle de la mise en ligne de contenus aujourd’hui considérés comme privés et préjudiciables. Inversement, elles deviendront suspectes si on ne trouve aucunes photos d’elles en ligne. Certains prédisent, pour le déplorer ou pour s’en féliciter, que c’est la notion même de privacy qui deviendra peu ou pas compréhensible pour les générations à venir.
D’autres experts sollicités dans le cadre de l’étude ne partagent pas cette vision de la disparition prochaine de la privacy et ils évoquent différents scénarios possibles. Selon certains, une partie du public excédé par les intrusions croissantes des entreprises et des pouvoirs publics réagira soit en renonçant aux activités en ligne soit en se livrant à des actes de désobéissances civiles. Les technologies de protections des données personnelles, et plus particulièrement la cryptologie, se déploieront à une large échelle à mesure qu’elles gagneront en simplicité et en efficacité.
Pour d’autres, au-delà de la seule maîtrise des outils de chiffrement, il y aura un autre moyen pour assurer la protection de ses données personnelles et de sa vie privée : l’argent. D’ici 10 ans, la privacy ne sera plus un droit universel mais une option commerciale, voire un luxe, que pourra s’offrir la partie la plus aisée de la population.
Enfin, certains experts optent pour une synthèse en tablent sur la persistance de facteurs à la fois favorables et défavorables à la privacy pour la décennie à venir. Il s’agira d’une séparation du public entre ceux qui veulent une protection de leur vie privée et ceux qui optent systématiquement pour la facilité de l’usage. La distinction pourra également s’opérer entre, d’une part, des discours publics valorisant de plus en plus fortement la vie privée et, d’autre part, des comportements individuels qui aboutiront à l’abandon du contrôle sur ses propres données.
Le rapport est à lire sans attendre 2025, ne serait-ce que pour faire en sorte que la plupart des prédictions ne se réalisent pas.
Arnaud Belleil – 22 janvier 2015
Lire la totalité de l’étude (79 pages en anglais)
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